432                         JOURNAL DE HENRI III.
au logis dudit Hatte, pour sçavoir que vouloient faire ces gens armez là-dedans : mais ils ne le voulurent lais­ser entrer, et retinrent un valet de chambre du Roy qu'il leur avoit envoyé, sans vouloir .parler à lui. Adonc le lieutenant civil envoya querir force sergens et com­missaires pour la forcer; mais voyant que la commune s'élevoit, et que la plûpart de ceux qu'il avoit envoyé querir étoient gagnez du côté des mutins, fut contraint de se retirer, pour aller le tout faire entendre à mes­sieurs le chancelier et de Villeroy. Que si lors Sa Ma­jesté eût suivi leur conseil et celui du duc d'Espernon, Le Clerc et ses complices eussent été pris prisonniers, n'y ayant rien plus aisé; et le même jour eussent etc pendus et étranglez, qui eût été un grand coup d'Etat. Mais il en fut empêché par Villequier et autres, qui lui firent croire que le peuple de Paris l'aimoit trop pour attenter jamais quelque chose contre Sa Majesté: et par ainsi Le Clerc et ses complices, avertis par lui et quelques autres du conseil, s'absentèrent pour quel­que temps. Continuans donc en leur rebellion, ils dres­sèrent une nouvelle entreprise : que si Sa Majesté, le jour de carême-prenant, alloit en masque par la ville, comme de coutume, ils se jetteroient sur lui, et sur le duc d'Espernon et sa troupe : ce qu'ils trouvoient plus aisé en un tel jour qu'en im autre. De quoi je fis aver­tir incontinent Sa Majesté (pource qu'il ne m'étoit pos­sible ce jour-là d'aller au Louvre) qu'il ne sortît point ce jour-là.
Voyans à la fin que toutes leurs entreprises ne pou­voient sortir à effet, et craignans d'être prévenus par le Roy, messieurs les cardinaux de Bourbon étans allez à Soissons par commandement de Sa Majesté, ils pen-
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